Témoignage de Judith qui a eu une môle complète invasive
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Judith
le 21/06/2021 à 15:03 Citer ce message
Je témoigne 10ans après la maladie,
J'ai déjà beaucoup témoigné/écrit sur le groupe dédié à la maladie, à l'époque et depuis aussi en soutien pour les "nouvelles" qui avec le temps sont devenues des "anciennes" , mais il y en a malheureusement toujours des nouvelles qui arrivent.
Mais là aujourd'hui je vais écrire pour la première fois pour "tout le monde"
je vous préviens c'est long, je vais tronquer ce que je peux, mais je ne veux pas faire un résumé trop condensé. car c'est important de comprendre tout ce que cela implique
Commençons par le commencement
En juillet 2007, 1ère fausse couche à 12 semaine.
Le 25 octobre 2007, 2ième fausse couche. Ma gynéco me propose de commencer des examens (normalement qu'après 3 fausses couches) prise de sang pour moi et lui. Cariotypes et autres. Résultats: faute à pas de chance, rien d'anormal. Je tombe en dépression, je n'ai plus le goût de rien. Mon médecin de famille me demande d'attendre un an avant de retenter des essais bébés, pour laisser le temps à mon corps (et mon esprit) de se remettre de ces pertes.
En octobre 2008, je suis à nouveau enceinte, je vais chez la gynécologue pour faire une écographie,
mon taux ne double pas toute les 48h... la peur au ventre, on voit un petit sac dans l'utérus, il est vide mais c'est tôt, je n'en suis qu'à 6sa. Puis on voit un autre sac, mais malheureusement il se trouve dans ma trompe de fallope. Je repars chez moi, effondrée, dans l'incertitude total, je dois y retourner la semaine d'après pour voir l'évolution, ou consulter en cas de saignement ou douleur. avec un mot pour vérifier ma trompe vu que suspission de GEU (grossesse extrautérine)
La nuit suivante, j'ai des saignements qui commencent, je m'y rends. Ma gynécologue est injoignable, je me sens "abandonnée" elle m'avait promis de venir si je me rendais dans cet hopital non loin de chez elle. Ils finissent par appeler le gynécologue de garde. Quand il arrive ça l'emmerde, je le vois à son regard qu'il n'a pas envie d'être là. Il me fait une échographie, j'ai encore un petit espoir. Et là on voit plein de "bulles" , comme une grappe de raisin, dans mon utérus. il ne regarde même pas ma trompe malgré que je lui stipule le risque de geu. Quand je demande "et mon bébé?"
- ton glacial : il n'y a pas de bébé qu'un gros tas de cellule faite un curetage demain .
et il s'en va ! je demande si je dois rester à l'hopital cette nuit, "faites ce que vous voulez, je m'en fou"
je me sens tellement abasourdie par ce type, quelle manque de tact pour m'annoncer la perte définitive de mon 3ième bébé. il ne m'explique rien, je ne sais même pas si médicalement je dois rester ou non. Je décide de repartir et le lendemain à nouveau repartie pour un 3ième curetage.
J'arrive à l'hopital et on m'explique que ce ne sera pas qu'un curetage mais une laparotomie exploratrice à cause du sac dans ma trompe. Que je dois refaire une échographie de contrôle avant. Dans la salle d'examen, les pieds dans les étriers, le gynéco et l'interne vont dans la salle d'à côté... et reviennent avec 2 autres gynéco et 3 internes !!! on ne m'a jamais demandé mon avis, je ne comprends rien, ils parlent comme si je n'étais pas là... je ne suis rien... juste un cas... je ne comprends pas, leurs mots sont compliqués...
Je me réveille, on me dit qu'on doit me faire des prises de sang pour vérifier que mon taux descends, que sinon on me fera une piqûre toxique pour l'aider. On ne m'en dit pas plus. On m'hospitalise dans le quartier maternité (le plus dur à ce moment là je pense) On me fait quelques prises de sang à quelques heures d'intervalles, je suis sonnée, vidée, déprimée, je ne pose pas de question. C'est tellement douloureux de perdre un 3ième bébé.
Le lendemain c'est bon, je peux enfin partir, je rentre à la maison.
L'annonce 6 semaines après rendez-vous de contrôle : échographie c'est bon tout est bon, mais faite quand même une pds (je n'en ai jamais faite pour les précédents contrôles post curetages) On me rappelle le lendemain, je suis au cours, je dois voir la gynécologue urgemment, refaire une pds. Je ne comprends rien, je ne peux pas aller à l'hopital je suis au cours. Ma mère s'y rends à ma place. Elle me rappelle 1h après. Demain je dois aller à l'hopital, je commence une chimio... Le choc...
Ma mère l'a appris entre 2 portes dans le couloir de l'hopital entre 2 autres patientes (devant les autres patientes...) aucune explication...
Nous nous rendons donc à l'hopital pour aller commencer une chimio. On me fait la piqûre de méthotrexate dans les fesses "ne vous tracasser pas c'est pas fort, y aura peu d'effets secondaires, pas de perte de cheveux"et puis je dois attendre et là seulement on vient " m'expliquer" j'ai fais une grossesse molaire ou môle hydatiforme, c'est rare mais c'est pas grâve ça arrive, elle en a déjà traité pleins avec quelques piqûres: ça ira mieux, mon taux va descendre et ça ira (rien d'autres comme explications...) et le pire c'est qu'ils le savent depuis mon échographie avant la laparoscopie (c'est pour ça que plein d'étudiants et autres gynéco sont venu voir, car c'est un cas rare, et ils n'en voient pas souvent! si on avait pris le temps de m'expliquer, j'aurais pu comprendre et accepter...)
Je dois retourner faire une pds le lendemain. et puis téléphoner pour les résultats "félicitation vous êtes enceintes" heu non... mon taux ne descend pas... c'est noté dans mon suivi de pds... retéléphoné à gynéco, pour lui communiquer résultats, pour qu'elle me dise de retourner faire une piqûre dans 4 jours. et puis à nouveau pareil, re prise de sang, re "félicitations" (couteau dans une plaie ouverte à nouveau)rétéléphoné, dans des heures bien précises, lorsque je suis en cours. c'est difficile. puis ce n'est plus possible je suis vidée, exténuée, je ne peux plus lire, à peine regarder la tv, et encore des choses sans grand scénario si je veux pouvoir comprendre, je dors énormément la journée plus la nuit. puis c'est bon mon taux est à 400 je peux arrêter la chimio. Nous somme début décembre.
Et là mon médecin de famille ne trouve pas ça normal et nous demande de consulter ailleurs, à Saint Luc, il arrive à nous avoir un rdv en urgence la semaine d'après via sa nièce qui y travaille en service gynécologie justement. On nous demande de prendre mon dossier. En se battant on fini par avoir un compte rendu...
Rendez vous mi décembre, professeur alarmé par mon cas, se fâche devant l'incompétence de sa collègue, sur le fait qu'elle n'ait donné que le compte rendu. Il téléphone, elle se prend un savon. Et du coup il décide de me faire passer une hystéroscopie car à l'échographie on voit qu'il reste quelque chose, il veut pouvoir analyser, si môle complète ou partielle. mon col est fermé, on a pas le temps d'attendre on doit le faire. ça fait mal, ça pince très fort. Dans la foulée IRM, scanner... pds, mon taux d'bhcg (hormone de grossesse) augmente encore malgré que je ne sois plus enceinte depuis début octobre... rdv oncologue...
c'est une môle complète invasive (j'ai une masse de 3cm de môle implanté dans ma paroi utérine... ) , avec 4 nodules pulmonaires. L'oncologue prend le temps de bien m'expliquer ce qu'est la maladie : Maladie rare. due à une anomalie lors de la fécondation. c'est le placenta qui a un problème ses cellules se multiplient beaucoup trop vite. comme un cancer, ça a empêché mon bébé de se dévellopper et a envahi mon utérus, en général typiquement en grappe de raison avec un taux qui se multiplie beaucoup trop vite. je vais devoir faire de la chimio. de la plus forte qu'avant. et oui je vais perdre mes cheveux....des nausées, peut être des aphtes. j'ai peur, mais j'ai surtout peur de savoir si j'aurai un bébé un jour. il me rassure oui je pourrai en avoir un, cette chimio ne rends pas stérile. Ma maman et ma tante sont avec moi, ça m'est d'un grand secours. ma maman me soutient mais est terrifiée, moi je me concentre que sur cette envie de bébé, que je vais devoir attendre encore super longtemps... ma tante écoute et prend bien note de tout les autres trucs. ma maman est trop dans l'émotion et la peur. elle est terrifiée.
La chimio
le 22 décembre 2008, me voilà partie pour ma 1ère chimio à 45minutes de chez moi pour être dans un bon hopital, je vais devoir faire la route tout les jours une semaines sur deux (la deuxième semaine étant une semaine de "repos") ça prendra 45minutes pour faire passer le produit. J'aurais de la chimio jusqu'à ce que mon taux bhcg soit à zéro et puis 2 cures de consolidations.
ça fait mal quand on me pique, mes veines sont déjà pleines de bleu et de trou des précédents examens. on ne sait me piquer qu'à 3 endroits en tout et pour tout, j'en ai gardé les cicatrices.
samedi, dimanche et lundi, chimio à la maison, l'hopital nous donne les piqures une infirmière à domicile doit venir les faire, premier jour ce fut difficile, elle refusait, mais c'était le week end je devais prendre mon traitement, les semaines d'après il y a eu des paperasses en plus à faire pour leur permettre de faire ça légalement. avec mon homme on rit "elle joue aux fléchettes sur tes fesses" faut dire c'est impressionnant quand même. Je n'ai pas de nausée et je me sens moins fatiguée qu'avec la chimio "légère".
Durant la semaine de repos je suis envahie d'aphtes. dans la bouche, les joues, les lèvres, la langue,l'oesophage, les gencives, je ne suis plus que douleur. on ne voit plus un morceau de chair normal. je ne parvient plus à manger ni à boire, je ne parviens même plus à avaler ma salive, je la laisse couler hors de ma bouche. tout le monde me regarde horrifié à la maison (je vis toujours chez ma mère avec mes frères, mon compagnon, mes grand parents habitent en dessous, ma tante est très présente), tout le monde se sent tellement impuissant face à cette douleur que rien ne soulage. Le lundi je dois retourner faire une cure. et là ils "m'engueulent" pourquoi est ce que je me suis laissée souffrir ainsi! ils n'ont jamais vu quelqu'un atteint comme moi! en une semaine j'ai perdu 8kg ! je ne fais plus que 40kg pour 1m54. On reporte d'une semaine mon traitement, on l'ajuste. J'ai du dafalgan à prendre toutes les 4h, de la morphine à prendre toute les 4h également (en alternance) du gel de xylocaïne à mettre 10 minutes avant de manger ou boire. Des bains de bouches à faire. Et durant plusieurs semaines cela sera mon rythme de vie. Sauf que grâce aux médicaments je pourrai être un peu moins affaiblie par les aphtes, j'arriverai (si on me surveille) à boire un minimum sur la journée et manger un yaourt par jour et gober des coquillettes. le semaine de chimio j'en profite pour manger plus pour me rattrapper. Nous sommes obligé de laisser 2 semaines de repose entre chaque cure pour laisser le temps à mon corps de se retaper un minimum avant de rattaquer.
J'ai perdu mes cheveux, moi qui les avaient jusqu'aux fesses, ça a été dûr mais je me suis fait une raison, puis j'ai adoré joué avec des foulards les nouer, les associers.
Durant ce temps étonnement je suis "heureuse" Je reste forte, je dois être forte pour ma famille qui m'entoure, qui me soutiens si bien. et j'aime voir mes cousines, et les gens que j'aime. C'est très dur pour ma maman. Mon homme m'aime, on est soudé, même si il ne vit pas du tout la maladie de la même façon que moi (lui à peur pour moi, il est terrifié par la chimio, la peur de me perdre, moi j'ai juste vu la perte du bébé le reste n'est "qu'accessoire" ) je n'ai pas trop le temps de penser, ma vie est rythmée par les médecins, les médicaments, les cûres, les contrôles. Je ne supporte plus de voir la moindre femme enceinte, de voir de bébés etc... je les hais, c'est un sentiment horrible d'haïr quelqu'un, alors qu'on devrait se réjouir pour elle. mais pourquoi elles? pourquoi pas moi? pourquoi moi je vis ça juste pour avoir voulu un bébé? Je lis des témoignages sur la maladie, des témoignages ou des femmes ont vraiment pu avoir un bébé après cette maladie, après ces chimios...
Un lundi mon taux est à 0,54... à cause de lui j'aurai encore 3 cures, si il avait été à zéro, je n'en aurais plus eu que pour 2... c'est dur pour le moral...
à ce moment, en mars, je fini par être hospitalisée, je suis déshydratée, je n'arrive même plus à me forcer à manger. mes globules sont trop bas, j'ai une infection, mais étant sous morphine non stop et souffrant de la bouche je ne le sentais pas .Hospitalisée Je suis sous morphine intraveineuse. Et là je fini par écrire pour la première fois sur des forums dédiés à la maladie "atoute.org" et "centre des maladies trophoblastiques de lyon" celà m' a été d'un grand secour. Les filles sur lesquelles je suis tombée m'ont bien épaulée, avec leur parcours j'ai continué à y croire, j'ai repris espoir, je ne vivais pas tout cela pour rien, moi aussi j'allais avoir un bébé un jour! Grâce à une qui vivait dans ma région et qui était enceinte, j'ai pu arrêté de haïr toutes ces femmes enceintes que je croisais en rue, car si ça se trouve c'était ELLE et puis après ça m'a fait me rendre compte que dans toutes ces femmes, il y en avait peut être pour qui c'était leur bébé miracle... et ça m'a apaisée, même si j'ai continué de les enviées.
c'est " fini "
et puis un jour c'est fini, le traitement est fini, on le fête avec les infirmières du service qui ont été des anges tout du long avec moi. et là je m'écroule ! Je suis terrifiée, un taux qu'on vérifiait tout les 15 jours
voilà qu'on ne va plus me le vérifier avant des semaines??? et si il remonte? et qu'on s'en rends pas compte de suite? et puis je n'ai plus rien à faire, avant mes journées étaient rythmée par les médecins, les médicaments, l'alimentation etc... et là rien...et va falloir que je retourne aux cours, c'est difficile. mes copines m'ont vue m'ont soutenue, mes profs aussi. mais les autres de l'école...
d'ailleurs le jour de "ma rentrée" un type dans notre atelier à qui je n'avais jamais adressé la parole "tu devrais pas venir à l'école tu me fais peur, tu vas mourrir?" faut se le prendre dans les dents...
j'ai depuis le départ décidé de ne pas cacher mon histoire. ça me fait du bien d'en parler, même si les gens me regardent et ne savent pas quoi dire...
je fini par réussir à ma dernière année d'étude, les examens, mon mémoire...
S'en suit 18 mois d'attente avec une pds par mois pour vérifier mon taux. c'est dur entre mon homme et moi et les autres aussi, eux se réjouissent tout est fini, je suis guérrie... moi ce n'est que le commencement, le commencement d'une attente interminable, l'incertitude... l'attente encore l'attente.
c'est horrible d'attendre quelque chose qu'on désire au plus profond de sa chair.
"c'est rien tu es jeune tu en auras d'autres... tu as le temps... ne sois pas pressée, soit patiente... la nature est bien faite"
je ne veux pas entendre ça ! !! je m'en fou, ça ne m'aide pas,ça me met en colère !!! qu'est ce qu'ils en savent d'abord??? puis moi je voulais mes enfants jeunes, pas "vieille" ... et puis j'en aurai d'autres quoi
les 3premiers ne comptent pas? pour moi c'était mes bébés... jeles ai aimés...
je me sens si fatiguée... je dois faire des pauses dans les escaliers de la gare je ne sais pas les monter d'une traite... mes cheveux repoussent le bonheur de ressentir le vent dans mes cheveux et en même temps je les déteste, ils ne sont plus lissent, ils crollent ils sont court et font "repousse de chimio" c'est moche, je les veux jusqu'aux fesses, j'aimais les foulard mais avec les cheveux qui poussent ça gratte,ça glisse c'est chiant et inconfortable. je grossi, je suis restée entre 43 et 45 durant des mois (pour un poids de 48 de base) et là je suis à 53-54, je me sens grosse et moche, j'ai plein de bouton (vive la repousse des poils qui s'infectent...) , et incapable d'avoir un bébé en bonne santé. mon homme ne veut plus retenter, il a trop peur. je vis dans l'incertitude d'avoir un bébé un jour, je me sens trahie... je deviens hyper émotive, je pleure pour un oui pour un non. je pleure de tristesse de joie, pour toutes les émotions (devant la pub Knackki je pleure d'office quand la petite fille dit "mais t'avais dis qu'on ferait des Knackki?" pour vous donner une idée du niveau d'hyperémotivité) c'est difficile à vivre les gens ne comprennent pas, je dois faire avec...
début 2010 je fini par aller acheter une écharpe de portage, malgré que je ne sois pas encore autorisée à tenter une nouvelle grossesse. mais dans mon esprit c'est "si j'achète une écharpe de portage je ne peux pas l'avoir achetée pour rien, j'y porterai mon bébé un jour"
après les 18 mois d'attente, il fini par accepter qu'on retente, mais c'est la dernière fois... je suis terrorisée par l'idée d'une nouvelle grossesse et cet "ultimatum" moi je veux essayer encore et encore jusqu'à réussir...
Un paradoxe c'est que pendant quelques jours on a surveillé mon taux qui n'augmentait pas (pour ma 3ième grosssesse), puis pendant des mois on se réjouissait de chaque baisse de ce fichu taux, jusqu'au zéro durant la chimio. et puis durant 18 mois je l'ai surveillé, pour être sûr qu'il ne revenait pas. pris une pilule tout les matins, que je sentais se coincer dans ma gorge, car je ne voulais pas la prendre, mon désir le plus cher était d'avoir un bébé, encore aujourd'hui 10ans après j'ai encore la sensation de la sentir coincée dans ma gorge par moment.
me voilà enceinte ! ça y est! on est le 25 octobre 2010 (même jour que ma deuxième fausse couche) et là on prie pour que le taux augmente mais correctement pas trop pas trop peu... je vis au jour le jour, dans la terreur à l'idée que ça recommence... seul mon homme, ma mère et un de mes frères sont au courant et vive comme en pause avec moi.et cette attente encore cette attente.
première échographie à 6sa, il y a une grosse virgule avec un coeur qui bat, c'est un bonheur extrême,tout en étant terrorissant. 8sa pareil 12sa c'est le 24 décembre 2010. ce sera le cap fatidique des 3 mois... je n'ai jamais été plus loin dans une grossesse. c'est merveilleux tout se passe bien. on commence à se projeter. et là je savoure ma grossesse, j'arrive à ne pas me laisser envahir par mes peurs, mes craintes, même si la nuit ce sont des cauchemards, je vis à chaque fois une grossesse, qui va de plus en plus loin, mais qui s'arrêtent à chaque fois pour diverses raisons. Heureusement la journée,j'arrive à m'en détacher. Et je vis une grossesse idylique sans douleur, et dans le bonheur de ce moment que j'attendais tant.
En juin 2011 mon merveilleux Ezèkiel est venu agrandir la famille. Il a pansé beaucoup de mes blessures, je me sens enfin victorieuse sur les épreuves que j'ai passé pour l'avoir. Et d'un côté je suis "heureuse" d'être passée par là pour savourer chaque moment et la chance que j'ai de l'avoir.
3 mois après il faut surveiller que les hcg sont à nouveau à zéro. c'est bon. Je garde ce côté hyper émotif.
J'ai terriblement envie d'un deuxième enfant, mais mon homme est terrorisé à l'idée que la môle revienne, moi je me dis mais non c'est bon on a "assez donné" lui ne comprend pas que je veuille prendre le risque (il y a un risque minime que la maladie revienne après chaque grossesse aboutie ou non)
25 octobre 2012, je suis à nouveau enceinte (c'est rigolo les dates sont les même) les terreurs reviennent en puissance 1000... et si jamais j'en faisais une à nouveau? comment serai-je capable de m'occuper de mon fils? pour finir tout se passe bien et ma merveilleuse Esmée nait en juin 2013.
Pour tout le monde la môle est loin derrière moi. Et pourtant elle affecte encore mon quotidien de nombreuses années après, je suis incapable de lire un livre (ou chanter) à mes enfants sans m'arrêter à certains moments car je dois contenir mes larmes (de joies ou de tristesse), ou ma voix se brise sans que je ne puisse rien n'y faire. J'ai pourtant été chez une kinésio qui m'a énormément aidé à passer outre tout cela. Elle a pu atténuer fortement mon hyperémotivité, mais elle ne pourra jamais l'effacer, tout comme le fait que je grossi beaucoup plus vite qu'avant, mon corps garde en mémoire qu'il a été "en famine" à un moment et il stocke pour si un jour... en souvenir de...
Quand une cousine, ou une belle soeur ou une amie, m'annonce une grossesse, je suis terrorisée à l'idée qu'elles fassent une grossesse molaire, qu'elle passe par tout ce parcours... et j'en ai fait quelques crises d'angoisse. Heureusement que mon homme merveilleux est toujours à mes côtés.
La môle m'a rendue plus forte et plus fragile à la fois. Je sais maintenant que je suis capable de traverser de dûres épreuves (moi et mon couple) mais elle m'a brisée également. Notre couple a survécu, car on a tenu bon, on a traversé des épreuves très difficiles, la perte de nos bébés, la maladie,nos ressentis différents, notre façon à nous de vivre et traverser cela... plus les effets sur la libido... les tensions que cela à pu créer de se sentir incompris par l'autre. D'un autre côté on sait que du coup la vie n'est pas toujours toute rose. Les forums m'ont apporté beaucoup tout de même, grâce à eux, j'ai entendu parlé d'allaitement long, de signe avec bébé, de dme, du maternage proximal en général. J'ai fais de merveilleuse rencontre via la Leche League. Je suis devenue monitrice de portage. Le portage m'a beaucoup aidée dans mon besoin d'être proche de mes enfants tant désirés.
il y a 5ans nous décidions d'acheter une maison. et lors des démarches pour l'assurance vie, on me demande mon passé médical... si j’ai été hospitalisée pourquoi...ils bloquent mon dossier... pourtant les médecins sont formels ! je suis guérie, pas en rémission... la maison va finir par nous passer sous le nez, je dois courir à gauche à droite pour récupérer mon dossier complet à leur transmettre...
pour finir la banquière elle même s'est chargée des les appeler et leur a mis la pression pour qu'ils acceptent mon assurance vie...
comme quoi même des années après cette histoire me poursuivait encore...
Les forums ont été très important aussi. Pour ne pas me sentir seule que les autres soient de vraies personnes et pas justes des statistiques médicales. De partager les informations mais aussi nos pensées, nos coup de gueules, nos coups de mou, et nos victoires pour redonner espoir. Ne pas se sentir seule ou anormale avec nos tourbillons d'émotions. Même si en fait cela n'a pas été toujours tout rose, car on était un groupe "d'anciennes" on prenait les nouvelles des unes des autres et de nos bébés miracles. et puis des nouvelles nous on renvoyé qu'on étalait notre bonheur. de là on a créé un groupe facebook "mole hydatiforme" pour nous permettre d'échanger sur tout les aspects de la maladie,l'information, le pendant, le traitement, l'attente, mais aussi l'après !
Cette année ça a fait 10 ans et ça m'a retravaillé plus que les autres années, c'est bizarre ça fait pourtant 4-5 ans que j'ai réussi à faire la paix avec ce passé... ça semble si loin et si proche à la fois. Les enfants savent. On en a déjà discuté avec eux. Et je trouve ça hyper important de ne pas en faire un tabou.
Parce que les fausses couches ne doivent pas être un tabou. Et que cette histoire fait partie de leur histoire. Car sans elle je ne serais pas celle que je suis aujourd'hui.
Vous êtes enfin arrivé au bout de cette histoire
Qui est longue et que j'ai pourtant tellement condensée pour ne pas en faire un vrai roman. -
le 07/10/2022 à 13:40 Citer ce message
Bonjour
Je suis elodie et je suis perdue et terriblement triste. J ai eu une grossesse molaire totale puis je suis en récidive avec une mole invasive . Je dois commencer la chimio . J ai déjà des enfants mais je me suis remariée et ce nouveau bébé a 41 ans c’était comme un nouveau souffle. Comment en avoir encore après le long combat qui m attend et personne ne me comprend : tu as déjà des enfants, de quoi tu te plaint ?
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